Tu étais venu à moi, il y a si peu de temps [Laurentius Lamberski]

[justify][font:65fb=Times New Roman]Et tu étais un enfant alors. Mes cils ont battus, te voilà un homme[/font][i], songeait-elle alors que ses yeux fixaient les grandes portes muettes et closes au devant d'elle. Nulle nostalgie, nulle mise en abîme des tourments qu'on supposait apportés par l'éternité. Il n'y avait là que le relent d'une vague surprise devant un phénomène maintes fois constaté, qui n'était que le temps écoulé et les ravages qu'il pouvait faire sur les portraits passants. Elle qui n'était que constance, peut être simplement plus froide et plus figée encore avec les orages des décennies, avait vu tant de nourrissons devenir vieillards avant même d'avoir été pleinement matures qu'il lui était presque pénible, dorénavant, de considérer un instant le poids d'une existence autrement que surestimé. Du sable, une esquille dans un vent sec, un détail, rien de plus, parfois moins encore. Un éclat sur le satin de sa robe aux couleurs d'automne.

Il lui fallait pourtant considérer encore et encore ces fétus de paille et de brindilles moins nobles qui venaient rouler à ses pieds juste avant de tomber en poussière, avoir la patience de les rassurer, de leur parler, de faire mine encore cette fois qu'ils puissent être importants, faire l'effort de se remémorer les noms, les attitudes, cacher le dégout et le mépris qu'elle avait à encore devoir leur mettre le nez dans leurs obligations et de leur flatter l'échine pour qu'ils la courbent et s'attèlent au labeur qui attendait. Ce garçonnet couvert de sueur qui allait se présenter à elle revêtu de l'apparence de la puberté mûre avait au moins pour lui de ne l'avoir pas encore trop déçue. Elle avait pris l'habitude de ses propres attitudes face à lui, savait comment lui parler, savait comment sourire; il en serait moins pénibles que d'autres. Comme ce Conseiller, là, qui était venue à elle pour lui souffler que Lamberski avait été aperçu en ville et ajouter qu'il s'inquiétait de quelques rumeurs en ville, depuis un bannissement.

Ses yeux passèrent sur les enluminures contournées de la porte, qui évoquaient les branches entremêlées d'un arbre centenaire qui aurait poussé dans un lieu trop étroit. Demain son mot aurait trouvé la bonne personne, demain le banni serait retrouvé en compagnie de criminels, et serait exécuté avec eux. On louerait la clairvoyance des Lumières, on se féliciterait de la victoire de la vertu, et ce cher -Question tarifs et exigences, principalement- Dust dirait que la tradition a été respectée en ce qui concerne ceux qui n'ont pas su entendre les règles qui n'avaient pas été prononcées. Mais, bien entendu, son conseiller n'en comprendrait rien, si ce n'était sa légère crainte. Si ce n'était son léger doute, que l'Archevêque sentait monter, petit à petit en lui.

Peu lui importait, après tout, puisqu'à perdre ses illusions pour en gagner la peur, l'homme n'en devenait que plus docile.

Ses iris noirs se trouvèrent voilés un temps de la lourde chape de ses paupières, quand les portes murmurèrent qu'on les poussait alors. Ses yeux se rouvrirent sur le visage serein, distant et pourtant attentif de l'Ange céleste penché sur son Saint. Le masque idéal qu'elle ne peinait pas à prendre. Elle s'était redressée, avec le chuchotement plus bref et plus délicat du tissu ocre sombre et mordoré de sa robe complexe, et sa main s'écarta pour s'ouvrir, au devant de ce qui avait été préparé. Verres gravés, vin fin. Depuis son fauteuil qui était un trône, elle sentait l'émoi perceptible qui lui était aisément définissable, depuis son salon qui était le lieu de tous les complots, sa voix laissa choir.[/i]

[list][color:65fb=goldenrod][font:65fb=Times New Roman]Je t'avais attendu, Laurentius. Sois le bienvenu encore auprès de moi. Viens, étanche ta soif, étanche la mienne qui est de savoir ce que ton âme a su accomplir encore.[/font][/color][/list]

[i]Un étroit sourire marqua ses lèvres, une fermeté attentive marqua son âme. Jamais, au devant d'elle, on n'avait cessé de prouver valeur et dévotion. Jamais.[/i][/justify]

Un rythme lent, calme et calculé résonne dans l'aile presque déserte du palais. Le luxe de la suite archiépiscopale suit un instant la mesure battue par les bottes de l'homme qui se rend auprès de la seule femme au monde capable de le plier à sa volonté. Il prend soin d'éviter chaque domestique, le corps drapé dans sa cape bleue nuit.

Cela fait plus de trois mois qu'il a fait le même chemin qu'aujourd'hui, bien qu'en sens inverse, avec ses derniers ordres. Et comme à chaque fois, ses pensées sont occupées par Elle. Il se prépare à savourer comme il se doit l'honneur que la Haute Dame lui fait de le recevoir ainsi dans son salon

Ses pas résonne toujours, alors que son cœur bat au rythme de la crainte, de l'espoir, du respect et du désir qui l'anime un peu plus à chaque battement. Enfin, devant lui, les portes qui le sépare de la fin de sa mission, du début de la prochaine, et d'Elle.

Alors qu'il pousse les deux battants, il expire, et relâche tous ses sentiments indignes de la situation. Un pas en avant, il à les yeux rivés sur Sa Grandeur. Un pas plus tard, alors que les portes se referment d'elles même, il baisse les yeux, et s'incline respectueusement devant La Mère des Lumières.

Sa voix résonne soudain dans la pièce, et seul le caractère de Laurence l'empêche de tressaillir alors qu'il redresse la tête. Reprenant contenance, il s'avance vers la table, et s'y assied, tout en répondant :

"Merci de me recevoir ainsi, votre Grandeur. Ce sera avec un grand honneur que je répondrais à chacun de vos désirs."

La fin de sa phrase sonne faux, il le sais. Oh, ce n'est pas un problème de mensonge, mais il est encore mal-à-l'aise. Il dois retrouver, comme à chaque fois, ses marques. Ainsi, pour se faire, il boit une gorgée de vin, peut-être un peu plus vite que l'étiquette le lu ordonnait, mais tant pis.

La douceur et les arômes fruités du grand-cru calment un tant soit peu les battements qui résonnent dans sa poitrine, et c'est d'une voix plus douce et surtout plus naturel qu'il entame son récit :

"Sachez que tout ce qui se dit sur Enh'Kilath est vrai, encore aujourd'hui. Le voyage pour m'y rendre fut dur, et seul, j'ai dut affronter deux embuscades rien qu'entre ici et Aubaine, et en ai esquiver deux fois plus. Puis, la partie la plus longue, entre Enh'Kilath et Aubaine fut longue et laborieuse. La plupart des caravanes que je croisais sur la route se méfiaient d'un voyageur solitaires, et je me méfiais tout autant de celles qui ne le faisaient pas. D'ailleurs, par soucis de sécurité, j'ai fait la fin du voyage en compagnie d'un marchand de sel et de deux marchand de métal, à qui j'ai pus revendre tout ce que j'ai pus emporter des embuscades précédentes. C'est affolant la différence de prix entre ici et là-bas..."

Les mots sortent de sa bouche comme s'il raconte une histoire ou un conte, même si par moment il semble hésiter entre les termes à choisir.

[i]Silencieuse, elle l'observait approcher, craindre, s'assoir, boire et tenter de se retrouver lui-même. Un calme impénétrable émanait d'elle, à l'image d'un grand océan placide sous un vent ténu. Sa respiration lente en étaient les vagues sans ressac, sans heurt. Face au tumulte perceptible que sa présence au devant de lui provoquait dans ce jeune homme, elle ne montrait rien d'autre qu'une inhumaine sérénité, un sourire frôlant tout juste ses lèvres enviables, achevant d'ôter ce qu'il y avait de femme pour sacraliser ce qu'il y avait de l'ange.

Non pas qu'elle cherchait à l'apaiser. Non pas qu'elle était humble. Tout sauf ça. Cette impression d'éternité ne pouvait être que vertigineuse, qu'impressionnante, quand bien même elle était là presque passive. Les flots des émois qu'elle contemplait au devant d'elle étaient de la pluie sur l'océan, rien de plus, peut être bien moins. Elle les ressentait comme un mécène voit les tableaux des apprentis de celui qui a eu sa faveur. De pâles copies qui n'auraient jamais la saveur des premières toiles. Qu'importe leur élan, qu'importe leur talent; ainsi il en était de l'âme humaine.

Elle se redressa, oh, si peu, un rien à peine, un appui sur ses mains et quelques plis qui se forment aux drapés couvrant ses hanches. Un fragment d'air serpenta entre ses lèvres, se modelant en cette sonorité si ample, imposante et pourtant mélodieuse. [/i]

[list][color:f1b8=goldenrod][font:f1b8=Times New Roman]Il est acquis depuis bien longtemps avant que tu n'ouvres les yeux sur ce monde, cher garçon, que la vilénie de cette contrée n'a d'égale que son désordre... Et qu'ainsi ses routes en sont l'extension de son sang et se son engeance. Dangereuses, perfides, et à éviter pour qui n'est ni armé ni endurci.[/font][/color][/list]
[i]La phrase était simple, elle pouvait laisser entendre qu'elle avait prêté une attention sincère au début de son récit qu'il énonçait avec une emphase grandissante. Mais ce n'était pas le cas. Elle signifiait, avec cette froide douceur et cette autorité ciselée et délicate qui n'appartenaient qu'à elle, qu'elle désirait à présent des faits, la détermination de l'objectif en lui même, non du voyage qui avait pu l'entourer. Et encore moins des basses contingences matérielles ou du commerce qu'il avait dû ou pu faire. Qu'il y ait besoin de davantage de dispositions monétaires, soit, il ne lui fallait que demander. Qu'il les illustre, elle perdait de son temps éternel et quelques gouttes de sa patience cachectique.

Un sourire peut être plus appuyé para ses lèvres, alors qu'elle plissa légèrement les yeux, reprenant après une infime seconde suffisante à ponctuer ses paroles de ce qu'il leur fallait d'impérieux.[/i]

[list][color:f1b8=goldenrod][font:f1b8=Times New Roman]Il m'est agréable de constater que tu n'as pas été blessé, du moins pas assez pour en garder séquelle.[/font][/color][/list]
[i]Juste quelques mots pour l'enjoindre à aller aux faits importants. Juste quelques mots d'un adorable manque de pitié. S'il avait été choisi, c'était parce qu'il était capable d'incarner les intérêts de la Cité, non les siens. Il s'agissait de le prouver, encore.[/i]

Laurnetius, qui a craint de ne pas en dire assez, se voit renvoyer dans ses cordes lorsqu'il lui apparait rapidement que le récit haut en couleur de son voyage n'intéresse pas plus que cela son interlocutrice. Evidemment, quel imbécile il fait... Cette femme doit gérer toute une cité, elle n'a pas le temps de l'écouter déblatérer sur sa mission sur ce qui n'est pas essentiel.

Il hoche la tête lorsqu'elle prend la parôle pour la deuxième fois, et se force à sourire, reprenant contenance. En effet, il n'est pas blessé, mais inutile de raconter tout ce qui lui était arriver, et que deux mois auparavent il était alité dans une auberge pendant une semaine à cause d'une cheville en miettes. Finalement, il répond simplement :

"Je suis intacte, mis à part une cicatrice de plus. Ce n'est pas le cas de la cible que vous m'aviez désigner d'ailleurs. Comme prévu, et comme vous l'avez surement appris, il est mort et enterré depuis une lune à l'heure où nous parlons."

Il boit une gorgée rapidement, puis reprend :

"Mort empoisonné suite à une blessure par balle, voici la vraie version, et non mort de maladie dans son sommeil comme la rumeur le prétend."

Il n'est jamais bon pour une nation d'avouer qu'un de ses lieutenant à été abattu, alors qu'un lieutenant succombant à une forte fièvre contracté lors d'exercices, ça n'a rien d'extraordinaire.

Laurence regarde la femme un instant, et semble se noyer dans son regard. Il se reprend juste après, ayant déjà trop patienter avant de passer à la suite.

"J'ai aussi profiter de ce voyag pour ramener une relique volée à un fort notable de la ville, qui ne semblait pas au courant de ce qu'il possédait. Toutefois, j'ai appris, à la suite d'une embuscade raté que la tête de Laurentius Lamberski est mise à prix dans tout Enh'Kilath, comme étant un voleur doublé d'un hérétique. Je ne pense pas que ma couverture en patira plus que cela, tant que je n'aurais pas à retourner là-bas."

Après avoir parler, il se penche légèrement, et sort de sa cape une grosse pièce de métal, ronde comme une soucoupe, gravé de rune depuis longtemps oubliées. Il semble ensuite attendre un signal de Sa Grandeur pour bouger.

[justify][i]La pensée l'effleura qu'elle n'avait pas tout à fait perdu son temps avec cet enfant, ou cet homme -Peu lui importait, et le temps rendait la chose si vaine- et sans ciller, sans faire davantage que de plisser les yeux, elle écouta, encore. Prêtant tout autant d'attention aux flux et reflux des émois et de l'âme face à elle qu'aux fléchissements des mots, leur choix, les sonorités adoucies par les lourdes tentures disposées ça et là et vantant les mérites d'un héros en armes ou en découvertes.

Elle ne touchait pas sa coupe, à fortiori le vin qui était là tel un lac sanglant inutilement répandu au devant d'elle. Évocation fugace mais prenante de ce qu'on avait déjà pu faire pour elle. Elle se contenta de lever une main, pour la porter, paume vers le sol, vers ses lèvres. Non pour soutenir son menton, mais pour souligner le côté de son visage. Geste féminin qui aurait pu paraître coquet sur une autre qu'elle, qui ne faisait que souligner encore l'effroyable profondeur de son regard insondable.

A la mention du meurtre, l'Archevêque ne réagit pas. Pas de la plus petite inflexion, pas même d'un battement de cil. Elle savait, oui, il s'était accompli, certes. Il devait avoir coutume, comme tous ceux qui venaient à elle, de la voir ainsi marmoréenne face aux faits, quelqu'ils soient, s'ils avaient déjà été discutés. Les questions de temps, au devant d'Aloysus, n'existaient que dans la faiblesse de l'échec -Et mieux valait s'abstenir de revenir à elle sans avoir trouvé quelques méthodes pour corriger le douloureux contretemps.

Toutefois, elle haussa légèrement les sourcils, entrouvrit ses lèvres ourlées et sembla s'animer d'une once de vie comparable à celle du reste de l'humanité lorsqu'il mentionna, sans ambages, la relique, pour la lui dévoiler. Ses prunelles s'y déposèrent, et l'éternité de quelques secondes s'égraina lourdement. [/i]

[list][color:47e4=goldenrod][font:47e4=Times New Roman]Voilà curiosité inhabituelle, Laurentius... En as-tu tiré déjà quelque substance ?[/font][/color][/list]
[i]Les iris sombres et froids se reposèrent de nouveau sur ceux de l'enfant prodige et il aurait pu paraître à un espion particulièrement attentif que l'Archevêque souriait davantage. Et au propos du vol, comme de sa découverte, elle ne fit aucun commentaire. Enh'Kilath et son engeance méritaient bien davantage, et c'était là chose entendue.

Son intérêt était à présent piqué, fait suffisamment rare pour être souligné. Elle se prenait presque à espérer qu'il ait déjà percé le secret de l'antique fragment de pouvoir, ou peut être bien qu'il ne répondrait qu'à elle ou à quelqu'un de son rang. Ou bien, peut être serait-ce une perverse malédiction de ces terres honnies...[/i][/justify]

Laurence regarde la femme qui semble prendre vie à l'évocation de la relique. Il sait qu'elle a pour habitude de ne rien montrer de ses sentiments, mais une pointe de frustration vient piquer le cœur de l'homme quand il voit le désintérêt total d'Aloysus pour sa mission se changer en un fugace intérêt pour la relique.

Néanmoins, en bon soldat qu'il est, il ne peut s'empêcher de continuer sans rien faire remarquer :

"J'ai fait quelques recherches sur elle lors de mon passage en Aubaine."

Il pointe du doigt une des parties du disque, et commente :

"Ici par exemple, il s'agit, à en croire le symbole sur l'écu de l'homme, de Marcus Ehlian. Selon les histoires, Marcus aurait été le chef de guerre de la meute des Chiens-Loups. Celui-là même qui fut responsable de nombreux massacres en nos terres comme ailleurs voilà maintenant plusieurs dizaines de générations. On raconte aussi qu'il est mort empoisonné par son second, ce qui m'amène au deuxième point de mes recherches."

D'un geste large, il englobe les quatre fleurs qui entours l'homme à l'écu, et continu :

"Là nous avons une fleurs de vive-lière, qui est aussi appelé mort-rampante, à cause de l'extrême nocivité de ses feuilles. Ici il s'agit d'une fleurs de Romarin d'Espélior, qui est, comme vous le savez le symbole de la longévité." Il passe sa main sur les deux autres fleurs, et reprend machinalement :"Celle-ci est une fleurs de fraisier divulgaria, classiquement appeler fraisier sauvage. La dernière me fait vaguement penser à une fleurs de cerisier d'Emer, connu pour ses fruits au goût très amer. Pour ce qui est du personnage central contre qui se bat Marcus Ehlian, cela reste un mystère."

Il retourne ensuite le disque, et montre son autre face à l'Archevêque :

"Pour finir, cette face-ci est pleine d'écriture d'un langage dont je n'ai jamais entendu parler."

Il repose le disque sur la table, et la regarde calmement, ayant fini son exposé.

[justify][i]Une once de désappointement vint tâcher l'onde de son âme, tuant net ce qu'elle avait pu avoir d'élan famélique à la nouveauté et confinant son intérêt qui n'avait connu qu'un ressac à un souvenir déjà défunt. Elle avait senti, sans en être véritablement affectée, la pique aigre de la jalousie de ce jeune garçon contre sa propre trouvaille. C'était pathétique.

Sans perdre une once de son sourire, ni de son attitude à la fois avenante et distante, elle retrouva d'une inflexion l'appui du dossier de ce fauteuil aux allures de trône. Sa main quitta son visage pour se déposer sur la ronde extrémité de l'accoudoir. Les hommes, quoi qu'il puisse arriver, étaient désespérément les mêmes, encore et encore. Et ils étaient tous si puérils et vains. Qu'ils reviennent de mission, il fallait les en flatter alors qu'ils avaient été forgés, rémunérés dans ce sens et qu'ils l'étaient encore. Qu'ils présentent un fait nouveau et il fallait les en glorifier avec fougue et force hypocrisie, pour qu'ils puissent se gonfler de toute l'importance qu'ils se donnaient alors d'avoir fait, par surprise, quelque chose de mieux que l'attendu minimal pour une fois.

Mais, soit, frayer avec les mortels était à ce prix, elle le savait. Elle peinait à croire encore, malgré ses souvenirs, malgré les faits irrévocables, qu'elle était née de la même engeance, qu'elle était bel et bien de chair tout comme eux. Ne trouverait-elle donc jamais un seul être né qui ne l'agace pas tant de sa faiblesse ? Toujours était-il qu'elle cédant, parant son regard d'une bienveillance presque maternelle et sereine, criante de sincérité au point qu'un empathe n'y aurait pas cru ses sens, et qu'elle reprit d'une voix lente et caressante.[/i]

[list][color:ab37=goldenrod][font:ab37=Times New Roman]A mesure des années, je ne peux qu'espérer toujours davantage tes retours. Tu deviens toujours meilleur, au point qu'Aubaine me jalousera de t'avoir lorsque le siècle te frôlera sans doute.[/font][/color][/list]
[i]Et ce fut sa conclusion à l'exposé docte de l'homme. Le savoir, elle l'avait bu, le pouvoir, elle l'appréhendait, mais il n'était pas l'heure de se jeter avec avidité sur lui et elle n'était pas femme à être empressée. Ni avide. Sa main traça un arc de cercle évocateur, lorsqu'elle inspira lentement, pensant avoir sacrifié assez de son temps à ménager l'incapacité des mortels à se contenter d'être utiles.[/i]

[list][color:ab37=goldenrod][font:ab37=Times New Roman]Je ne vois pas meilleur gardien que toi pour cette relique, le temps que tu es en nos murs. Pour l'heure, rien d'urgent ne te pousse au dehors, et je songe que tu dois brûler de te reposer et de retrouver la splendeur de la cité après tant d'épreuves. Les étudiants pourront se pencher, avec toi si tu le désires, sur cette énigme. Tu la leur montreras.[/font][/color][/list]
[i]Le silence revint alors qu'elle le frôlait d'une oeillade amène, et que son être tout entier se tournait déjà vers la science. Elle n'attendait plus qu'il acquiesce et parte, sauf s'il lui restait à parler. [/i][/justify]

Laurentius regarde la femme, et l'écoute parler, alors que son âme continue de cliver au sein de ses humeurs instinctives. Certe, il est déçu que l'intéret d'Aloysus ne se soit réveillé qu'à la mention de la relique, mais soit. Il doit bien admettre qu'au fond c'est autant son travail que celui d'assassiner ses cibles.

Sa fierté, autant personnelle que celle de servir la Mêre des Lumières sort grandie des parôles de la Dame. D'un naturel, et d'une franchise qui aurait put en laisser plus d'un pantois, il répond de sa voix calme :

"Aubaine ne peut que vous jalouser, quelle que soit le dômaine, votre Grandeur!"

Il tressaillit néanmoins quand elle parle de lui laisser la relique. Il ne l'a clairement pas prévu, voir même le contraire. Il ne peut donc s'empécher de répondre :

"Loin de moi l'idée d'aller contre l'un de vos ordres, votre Grandeur, néanmoins je ne pense pas que cette relique soit en sécurité avec moi. Ehn'Kilath a mit ma tête à prix pour ce vol. S'il devait m'arriver quelque chose sous la main de ces assassins, autant qu'ils ne prennent pas, en plus de ma vie, la relique."

Il a posé la relique sur la table, devant lui, mais n'a fait aucun mouvement pour la reprendre lorsqu'elle lui a dit de le faire. Néanmoins, s'il a bravé une fois les ordres de l'Archevêque, il n'est nullement question qu'il recommence. Et si elle tient à ce que ce soit lui qui la garde, alors il la garderait.

Il ne ressent pas vraiment la peur que certain pourrait imaginer ressentir quand on leur demande une tache dangereuse. La seule peur qu'il pourrait ressentir est celle d'ennuyer la Mêre des Lumières en rendant, contre son gré, la relique à ses anciens propriétaires.

[justify][i]Aucune réaction ne vint accuser entente de la flatterie pourtant si sincère et si droite venue à elle. Elle la contemplait comme un joyau éphémère qui bientôt mourra, et comme tout ce qui ne faisait que passer, l'Archevêque la considéra comme ce qu'elle serait après, de la façon la plus durable: De la poussière agitée par le vent.

Si quelques secondes plus tard, quelque chose ourla le coin de ses lèvres suaves -Bien malgré elle- ce n'était pas le ravissement, ni l'aménité, ni même quoi que ce fut d'attentionné ou de positif. C'était la trace infime de son désappointement pour n'avoir pas été comprise. Laurentius n'était pas mal attentionné, loin s'en fallait. Il n'était pas mauvais à ce qu'il pouvait entreprendre, mais en cet instant précis il l'avait déçue, à croire qu'elle pouvait commettre une erreur de jugement, et d'autant plus à la remettre en cause aussi directement.[/i]

[list][color:25c6=goldenrod][font:25c6=Times New Roman]Oui, c'est entendu.[/font][/color][/list]
[i]Souffla-t-elle alors d'une voix dont la neutralité parfaite ne révélait pas le moindre détail de ses émois les plus infimes, comme les plus grands. Elle prit appui sur ce trône qui la soutenait jusqu'à faire partie intégrante de l'image qu'elle donnait pour se relever, découvrant son corps d'oiselle charmante, d'ange dramaturge dans son vêtement de soleil à l'agonie. Elle reprit, alors que ses yeux se portaient à la fenêtre, vers le lointain, que déjà elle n'était plus avec lui.[/i]

[list][color:25c6=goldenrod][font:25c6=Times New Roman]C'était là ce que j'entendais par, le temps que tu seras en nos murs. Si Ehn'Kilath ose faire venir un assassin jusqu'au derrière des murs blancs, jamais, ô grand jamais il ne les franchirait de nouveau, ou seulement en cendres. Sois tranquille le temps de nos études au propos de ta trouvaille.[/font][/color][/list]
[i]L'immobilité de nouveau régnait autour d'elle, lui rendant cet aspect de statue de nymphe à jamais virginale. Sa chevelure épaisse, en cascades boisées, soulignait de son intensité sombre la blancheur de son visage, l'éloignement de son regard, l'arc de ce sourire éternel et figé, froid comme le marbre d'une tombe.

A présent il n'avait plus qu'à partir. Profiter de la vie. Avant qu'une prochaine missive, qu'une future entrevue ne devienne ce couperet qui l'attendait depuis qu'il s'était voué à elle.[/i][/justify]

Laurentius est congédié. Il s'incline bien bas, et dit d'une voix calme :

"Il en sera fait selon votre bon-vouloir votre Grandeur. Je suis à votre entière disposition, et je m'attèle dès aujourd'hui à m'informer sur la relique."

Ce n'est pas à lui de demander la bénédiction du Tout-Puissant, et si l'Archevêque ne la lui donne pas, c'est qu'il n'en est surement pas digne. D'un autre côté, cela ne le gêne pas outre-mesure, mis-à-part l'idée d'avoir put décevoir la Mêre des Lumières.

Il prend la relique sur la table, et la fourre sous sa veste, la remettant là où il l'avait en arrivant. Il se détourne, et repart calmement vers la porte, sa tête pleine de contradiction. Il a confiance en la Dame, une confiance aveugle même, mais si lui a réussi à dérober la relique en Ehn'Kilath, et à tuer quelqu'un là-bas, pourquoi un agent de la ville maudite ne pourrait pas le faire ici?

Il ouvre un des battants, et se glisse dehors, sans un mot, remettant sa capuche sur sa tête. Les assassins d'Ehn'Kilath ne sont pas plus bête que d'autre, et Laurence doute qu'aucun garde de la cité ne puisse faire rentrer en douce quelqu'un contre une forte somme d'argent. Il est d'ailleurs surement possible, voir même sur, qu'Ehn'Kilath a déjà ses agents dans la place.

Il secoue la tête en marchant, ses pas résonnant contre le dalage du sol. Si l'Archevêque a dit qu'aucun ennemi ne pourrait remporter la relique, c'est qu'il en sera fait ainsi. Elle a surement d'autres atouts dans la manche qu'elle ne souhaite pas dévoiler à Laurentius. Oui, c'est surement ça!